Les mécanismes de la perte de confiance • Manifestations de la perte de confiance • Comment lutter contre cette perte de confiance ?
Les mécanismes de la perte de confiance
Introduction
- La douleur, lorsqu’elle s’installe, perturbe les habitudes de vie, déstabilise, fragilise le patient lombalgique physiquement et psychologiquement.
- Apprendre à vivre avec, modifier ses activités, s’organiser pour ne pas majorer sa douleur, sont autant de facteurs qui changent le regard au monde, le regard sur soi.
- Le patient lombalgique hésite à partir en vacances, hésite à accepter une sortie… Il se sent plus vulnérable, différent, il perd confiance en lui.
Principes
- La confiance en soi est un sentiment. Sentiment d’être capable d’agir et de surmonter les difficultés de la vie. C’est la voie d’accès à la liberté d’action et d’expression ainsi qu’à la responsabilité.
- La confiance en soi découle de la vision que l’on a de soi et de ses comportements. Elle se construit très tôt dans la vie, par les expériences (heureuses comme malheureuses), par les rencontres…
- La confiance en soi est une expérience intime, une richesse intérieure.
La douleur bouleverse la représentation de soi
- Depuis l’enfance, l’Homme est investi d’un sentiment de toute-puissance, d’immortalité (« les problèmes, y compris la mort, n’arrivent qu’aux autres… »).
- Tout le long de la vie, l’homme se nourrit des expériences pour développer des capacités physiques, intellectuelles et psychologiques. Ces capacités vont lui permettre de se réaliser dans différents domaines : familial, social, professionnel…
- Lorsque la douleur arrive, de façon brutale ou lancinante, l’homme est ralenti, freiné, perturbé dans sa construction identitaire, par cet événement extérieur qui fait intrusion dans sa vie. Le doute s’installe, le sentiment de toute-puissance est ébranlé.
La douleur est une atteinte narcissique
- Le narcissisme (amour sain, admiration qu’une personne éprouve vis-à-vis d’elle-même) est indispensable au développement de la vie affective, sociale ou professionnelle. Durant son évolution, l’Homme développe des aptitudes de séduction, de performance et de conquête, ainsi qu’une volonté d’être aimé.
- La douleur constitue une menace, une remise en cause de la force, de la séduction, de la possibilité d’être aimé.
- La douleur s’immisce dans cette construction de l’individu, il se sent trahi dans sa quête d’un idéal pourtant tant convoité.
Atteinte de l’intégrité corporelle
La douleur représente une atteinte de l’intégrité corporelle du patient :
- Perte de confiance dans son corps (« j’ai peur qu’il me lâche si je vais travailler »).
- Sentiment de trahison (« je ne reconnais plus mon corps… »).
- Sentiment d’injustice (« qu’est-ce que j’ai fait pour mériter cela ? »).
Atteinte de l’intégrité psychique
La douleur représente une atteinte de l’intégrité psychique du patient :
- atteinte du moi idéal (« je ne suis plus le même, avant je pouvais tout faire, rien ne m’arrêtait… »),
- effondrement du sentiment de toute-puissance,
- crainte de ne pas être à la hauteur, de ne pas faire face (« tout me fait peur, je ne sais pas si je vais arriver à faire les gestes que vous demandez »),
- menace de la perte d’identité personnelle (rôle et statut) (« chez moi ma femme a pris la relève, elle fait tout, moi je n’existe plus… »).
Situation de faiblesse
La douleur développe le sentiment de faiblesse du patient :
- Perception de ses limites physiques (« vous vous rendez compte, je marche 600 mètres, après ma douleur est insupportable… »).
- Peur de l’effondrement (« j’ai peur de ne pas tenir, je suis fatigué… »).
- Remise en cause de la projection dans l’avenir et de la capacité à faire face aux projets futurs (« je ne fais plus de projets, ma femme veut partir en vacances, je ne sais pas si c’est bien, pour le moment je préfère ne rien dire. On verra. »).
État de dépendance
La douleur rend le patient dépendant :
- Dépendance au corps médical (« je suis baladé de médecin en spécialiste, personne ne me dit rien »).
- Perte d’autonomie (« ma femme m’aide à mettre mes chaussettes et mes chaussures, quelle image vous pensez que j’ai de moi ? »).
- Dépendance aux proches (« pour venir vous voir, il a fallu que je demande à mon beau-père, qui est à la retraite, de m’amener… »).
Manifestations de la perte de confiance
Réaction de perte de confiance en soi
La perte de confiance en soi peut se manifester par :
- Le repli sur soi, la régression, l’infantilisation (« je passe mes journées à jouer à l’ordinateur… »).
- Le renforcement des mécanismes de défense : le patient se forge une épaisse carapace pour se protéger.
- Une mauvaise évaluation de la situation qui amène des pensées négatives et fausses (« je ne suis capable de rien… », « je suis foutu », « je suis vieux à 40 ans… »).
- Des troubles du comportement : abus d’alcool, tabagisme, conduites à risques, violence, agressivité…
- Des troubles de la communication (« j’ai de plus en plus de mal à m’exprimer », « je suis très mal à l’aise lorsque je dois prendre la parole au travail, j’ai peur que tout le monde voit que j’ai mal… »).
« Je ne suis pas capable »
- La confiance en soi vient de nos comportements, attitudes mais aussi de notre vision personnelle de nos qualités et de nos limites.
- La quantité des pensées négatives permet de prédire si le patient sera plus ou moins actif ou passif face à sa lombalgie.
- L’impression que la douleur est un phénomène qui ne lui appartient pas, qu’il ne peut la contrôler, qu’elle est contrôlée par des éléments extérieurs (traitements, médecins…) entraîne chez le patient lombalgique un sentiment d’impuissance (« je ne peux rien faire pour soulager ma douleur, il n’y a que les médicaments et le repos »).
- Cette dévalorisation de ses capacités personnelles amène le patient à glisser vers la sédentarisation, la diminution de ses capacités physiques et psychologiques et entretient sa perte de confiance en soi.
Comment lutter contre cette perte de confiance?
Principes
- Pour lutter contre le manque de confiance rien ne vaut l’expérimentation ; pour cela vous avez plusieurs outils :
• la relaxation,
• liste de ses qualités,
• corriger ses pensées négatives,
• mettre en œuvre des actions sur le mode « maîtrise – plaisir ». - Il est recommandé de les utiliser conjointement.
La relaxation : définition
- La relaxation est un moyen thérapeutique préventif ou curatif à la portée de tous.
- Elle consiste dans un premier temps à une déconcentration mentale et musculaire, obtenue par des exercices visant à prendre conscience de son corps et de ses pensées, pour atteindre ensuite la restructuration de l’individu.
- Diverses techniques proposées concourent au même résultat : libérer le corps d’une tension trop importante.
La relaxation : environnement
- L’environnement favorise la relaxation.
- Il faut privilégier :
• Une pièce calme, dans la demi-obscurité, une température moyenne,
• Des vêtements lâches, ni trop chauds ni trop légers.
La relaxation : positions
La relaxation peut se pratiquer :
- en position assise : fauteuil confortable, nuque bien calée et bras reposant sur les accoudoirs,
- en position allongée : la tête un peu soutenue, une légère couverture sur le corps, les bras le long du corps et les pieds légèrement écartés.
La relaxation : respiration
- La première phase de la décontraction concerne la respiration.
- On se concentre sur sa respiration en inspirant et en expirant lentement, régulièrement et profondément de manière à imprimer au corps un rythme apaisant qui va l’amener à se décontracter.
- Cette phase dure environ 3 minutes.
La relaxation : la visualisation
- La troisième phase consiste à substituer aux idées noires ressassées, des images positives.
- En pensée, on visualise une image agréable (lieu, personne, situation…). Les pensées parasites disparaissent petit à petit. On arrive ainsi à la pause mentale.
- Une pratique assidue peut conduire à être capable de se régénérer partout. Cinq minutes de pause mentale suffisent. Mais cela n’est possible que lorsqu’on a atteint la capacité de se déconnecter du monde extérieur en faisant le vide en soi de façon efficace.
Faire la liste de ses qualités
- Il s’agit de noter tous vos atouts le plus rapidement possible (1 minute) en répondant à la question suivante : « qu’est-ce que vous aimez en vous ? ». Puis refaites le même exercice en 10 minutes.
- N’écrivez que les qualités et non ce que vous aimez ou aimeriez être.
- Par exemple, écrivez : « je suis courageux », « je suis à l’écoute des autres », « je réussis très bien les pâtisseries »… mais n’écrivez pas : « j’aime la cuisine » « j’aime lire »…
- Le but de cet exercice est de vous rendre compte que vous avez beaucoup de qualités mais qu ‘elles sont étouffées à cause de la douleur et ses conséquences. Il vous montre aussi que même si vos qualités ne vous viennent pas en tête spontanément (exercice en une minute), en y réfléchissant vous en avez beaucoup (exercice en 10 minutes).
- Si même en 10 minutes vous ne vous trouvez pas (ou peu) de qualités, faites-vous aider par vos proches pour découvrir vos qualités.
Corriger ses pensées négatives
- Cette méthode consiste à analyser ses pensées négatives, en les remettant en cause : « S’agit-il d’une vision exacte de la situation ou une interprétation de la réalité ? ». L’objectif est de détruire toutes les pensées négatives qui sont fausses ou exagérées.
- Votre entourage peut participer à ce travail. Toutes ces techniques sont à utiliser en notant votre analyse et votre conclusion, afin de formaliser et « officialiser » vos conclusions. Vous pourrez ainsi utiliser à nouveau ces techniques, simplement en relisant vos notes.
- Dans un premier temps, faites la liste de toutes vos pensées négatives (tout ce que vous vous pensez incapable de faire, tous vos défauts…).
- Ensuite, vous pouvez utiliser quatre méthodes pour analyser vos pensées négatives une par une.
- La technique du pour / contre
Pour chaque pensée négative, posez-vous la question :
• Pour : « Quels sont les arguments objectifs, tirés de l’analyse de situations vécues, qui vont dans le sens de mes pensées ? ».
• Contre : « Quels sont ceux qui vont dans le sens opposés ? ».
Pesez le pour et le contre et corrigez vos pensées négatives à tort.
- La technique avantage / désavantage
Pour chaque pensée négative, posez-vous la question : « Est-ce que je ne trouve pas un certain intérêt à me percevoir d’un point de vue négatif ? ». Si c’est votre intérêt (paresse, facilité…), et pas une analyse objective, qui a amené une pensée négative, renoncez à cette pensée. - La technique du décentrage:
Imaginez qu’un ami se trouve dans la même situation que vous. Posez-vous la question : « Quels discours et quels conseils lui tiendrais-je? ». Appliquez à vous-même ce que vous diriez ainsi à un ami. - La technique des questions : Pour chaque pensée négative, posez-vous les questions :
« Comment est-ce que je le sais ? »
« Est-ce que je l’ai déjà fait ? »
« Pourquoi ne pas re-essayer avec une autre façon de faire ? »
« Peut être que quelqu’un peut m’aider ? Mais qui ? Qui peux m’apporter de bons conseils dans ce domaine ? »
« Dans le pire des cas, si je rate, que se passe-t-il ? »
Actions sur le mode « maîtrise-plaisir »
- Cette méthode repose sur la répétition d’actions réussies.
- Afin d’augmenter votre confiance en vous, chaque jour vous entreprenez une nouvelle action, associée à une de vos qualités, et vous la réussissez.
- Le but est de constater que vous pouvez réaliser ces actions, malgré votre douleur et d’éventuelles pensées négatives. Ainsi progressivement, vous allez modifier votre regard sur vous-même et reprendre confiance en vous.
- Pour cela : choisissez une action en rapport avec une de vos qualités. Réalisez-la. Constatez (et savourez) la satisfaction obtenue. Si vous avez du mal à réussir vos actions, choisissez-en de plus faciles
- Vous pouvez utiliser un tableau du type de celui ci-dessous pour suivre votre progression (c’est plus motivant quand on visualise ses progrès).
Jour Action choisie Maîtrise de l’activité* Lesquelles de vos qualitées avez-vous utilisées ? Votre degré de satisfaction par rapport au résultat obtenu** Lundi Marche de 15 mn 5/10 Endurance, courage 7/10 Mardi Poser une étagère dans le garage 7/10 Organisation, application, maîtrise des outils de bricolage 9/10 * 0 = pas de maîtrise 10 = maîtrise maximale
**0 = pas de satisfaction 10 = satisfaction maximale